Abus de majorité
Lorsque les associés majoritaires possèdent suffisamment de parts sociales pour imposer leur gestion, les minoritaires peuvent néanmoins défendre leurs droits en restant attentif à ce que les décisions de gestion qui leur sont imposées par les majoritaires restent bien dans l’intérêt de la société, et sans limiter leurs propres intérêts d’associés minoritaires.
L’abus de majorité vient limiter et éventuellement sanctionner la position dominante que pourrait prendre un ou plusieurs associés au sein d’une société civile immobilière en imposant aux associés minoritaires des décisions qui ne respectent pas leurs intérêts.
Définition d’un abus de majorité
Dans une société civile immobilière, très souvent, un associé possède quasiment toutes les parts sociales. Dans les SCI familiales, les parents détiennent généralement plus de la majorité des parts, s’assurant le contrôle de la société (la gérance et la majorité requise en assemblée pour faire voter les résolutions qu’ils proposent).
Pour cette raison des abus de majorité peuvent être constatés. Ces abus sont caractérisées par deux éléments :
– ils correspondent à des décisions, généralement des votes de résolutions prises en AG, favorisant les associés majoritaires,
– ces décisions ne sont pas justifiées par l’objet social, et ne servent pas l’intérêt de la société.
Exemple d’abus de majorité
Remplacement des gérants
Est considérée comme abus de majorité une décision prise en assemble générale et prévoyant à l’avance :
– le choix de l’identité du ou des gérants majoritaires qui remplaceront l’actuel gérant majoritaire,
– sans indiquer le moment auquel ce changement pourrait intervenir.
Loyer pratiqué
Ce cas de figure correspond à la situation généralement retrouvée dans les SCI détenant un local professionnel.
Ainsi, un entrepreneur utilise le local détenu par une société civile immobilière dont il est par ailleurs le gérant majoritaire. Ce montage n’est absolument pas interdit, bien au contraire, on en explique d’ailleurs les avantages sur ce site.
En revanche, a été jugé comme abus de majorité le fait que ce gérant majoritaire n’ait pas renouvelé le bail commercial liant son entreprise à la SCI et réévalué à toute autre occasion le montant du loyer pratiqué durant de nombreuses années.
Au final, pour les autres associés de la SCI, un préjudice existait à hauteur du manque à gagner de bénéfices, justifiant une procédure en recherche d’abus de majorité.
Bénéfices en réserves
Une décision prise par les associés majoritaires qui va à l’encontre de l’intérêt général de la SCI et ayant donc pour unique but de favoriser l’intérêt de ces majoritaires peut être attaquée en justice.
Cette situation existe notamment lorsque les majoritaires décident chaque année d’affecter le bénéfice de la société aux réserves sans que cette pratique réponde à l’intérêt de la SCI. Les minoritaires ont alors la possibilité d’engager une procédure contre les majoritaires (et non contre la SCI directement).
Cession d’un actif
Comment se débarrasser d’un associé avec lequel on est associé dans une SCI ? En créant une nouvelle SCI (sans cet associé évidemment), et en vendant les actifs de la première société à la seconde.
Cette cession engendrera des frais d’acquisition pour la nouvelle société, mais cette charge financière relève de la responsabilité des associés de cette structure.
En revanche, pour l’associé minoritaire de la SCI vendeuse, un abus de majorité existe dès lors que le prix de vente proposé est sous-évalué. En effet, cette sous-évaluation :
– bénéficie aux associés majoritaires (qui récupèrent le bien dans une nouvelle structure à un prix avantageux, limitant d’ailleurs peut-être au passage le montant de la plus-value dégagée),
– ne répond nullement aux intérêts de la société.
Sanction de l’abus de majorité
La décision de justice qui reconnait un abus de majorité entraîne la nullité de la décision qui a constitué cet abus.
Ainsi, dans le dernier cas évoqué de la cession d’un actif à un prix inférieur au prix du marché, c’est la vente immobilière qui est frappée de nullité ! Cet immeuble revient donc au bilan de la société civile immobilière qui le détenait avant la vente. Les conséquences financières indirectes sont donc très lourdes pour les associés majoritaires à l’origine de cet abus de droit. Ces derniers gardent la possibilité de renouveler la vente, mais en alignant le prix de la transaction sur celui généralement pratiqué pour une opération de même nature (en se basant de préférence sur l’évaluation d’un notaire qui peut justifier du montant définitif de transactions équivalentes sur un secteur géographique donné).
Par ailleurs, les associés majoritaires, s’ils sont l’objet de la procédure judiciaire intentée par les minoritaires, peuvent être condamnés au versement de dommages et intérêts à ces associés minoritaires.
L’abus de majorité est reconnu dès lors que l’associé majoritaire, ou les associés majoritaires, imposent une décision de gestion au sein d’une SCI qui les favorise sans aller dans le sens de l’intérêt de la société. Les associés minoritaires défavorisés ont la possibilité de recourir à la notion d’abus de majorité pour faire annuler ces décisions souvent prises en assemblée générale.
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